Vendanges

Vendanges

Depuis quelques jours, les vendanges ont débuté dans le proche vignoble. Je les vis toujours avec quelque nostalgie, car je me souviens bien sûr de celles que j’ai moi-même encore faites à Breitenbach lorsque j’étais enfant dans les années 1960, à une époque où nombre de familles entretenaient encore quelques parcelles de vignes pour leur propre consommation. En remontant plus loin dans le temps, avant ce maudit phylloxéraqui détruisit les ceps autochtones à la fin du 19ème siècle, on rappellera que Breitenbach comptait plus de 70 ha de vignes, implantées sur les coteaux raides, schisteux et ensoleillés de l’Ibrand , du Muhlberg ou du Niedereck. Avec Albé et St Pierre-Bois , nous possédions alors les vignobles les plus étendus de la vallée. Chez nous, la tradition viticole est d’ailleurs inscrite dans la pierre ; nous avons en effet relevé de très nombreux et forts anciens linteaux de porte décorés de motifs liés à la vigne (serpette, outils de tonnelier… vous les verrez dans le chapitre « Patrimoine » de ce même site). Un temps partiellement reconstituée avec de médiocres cépages hybrides, la vigne n’a cessé de décliner pour se réduire aujourd’hui à quelques parcelles résiduelles. On pourra regretter cet état de fait, car Breitenbach possède des terroirs identiques en tous points à ceux de nos voisins d’Albé où l’AOC a pu être obtenue grâce à l’implication et la ténacité d’une personnalité locale, Antoine ADRIAN , récemment disparu… notre paysage en aurait été bien modifié ! Mais partons en visite…

Nous allons monter à la croix FREPPEL au Muhleck (élevée en mémoire de Charles-Emile FREPPEL , Juge de Paix sous la Révolution et père d’un évêque-député), endroit d’où l’on jouit certainement de l’une des plus jolies vues sur le village (photo 1). En explorant les pentes de l’Ibrand au téléobjectif, j’ai trouvé ces parcelles de vigne (photos 2-3-4), un peu perdues dans les pâturages rénovés au pied de la forêt. Donc, direction l’Ibrand , d’où l’on profite également d’une superbe vue sur le village et la vallée (photos 5-6). Nos dernières vignes, encore amoureusement entretenues, sont littéralement emballées dans un tissu de grillage, rubans et clôtures (photos 7-8). Cacheraient-elles quelque trésor ? Certes, ce sont là les reliques d’une tradition fort ancienne, même si l’on ne prétendra pas rivaliser avec la qualité des crus d’Albé ou du Vignoble du Piémont. Ces protections sont surtout destinées à éviter l’intrusion des oiseaux, sangliers, cerfs et chevreuils, tous friands de grappes sucrées.

La vigne est une plante esthétique dans toutes ses parties, pas seulement les grappes. Les ceps tordus (photos 9-10), les feuilles encore vertes pour le moment, mais qui revêtiront bientôt une livrée cuivrée (photo 11)… J’ai néanmoins une préférence pour les vrilles, dont la fonction première est d’accrocher les sarments au fil (photos 12-13)… mais ces vrilles peuvent également décrire d’étonnantes calligraphies dans l’espace (photo 14), ou dessiner une improbable clé de sol (photo 15), sans compter les habitants du lieu qui vous guettent d’un oeil inquiétant (photos 16-17).

Mais je ne voudrais pas vous priver du meilleur. À défaut de vin nouveau nettoyeur d’intestins, vous vous consolerez peut-être avec quelques grappes et baies glanées au gré de mes pérégrinations dans les vignobles bas-rhinois ces derniers jours. C’est surtout le matin au soleil levant que les différents cépages proposent des couleurs et des lumières incomparables (photos 18 et suivantes)…