26 Sep Dans nos vergers
Après notre dernière escapade par chemins et lisières, retour dans et autour du village pour jeter un oeil gourmand dans les vergers qui constituent toujours une composante essentielle dans l’environnement paysager de la commune. Pour les arbres fruitiers, les années se suivent et ne se ressemblent guère, tout comme on constate également une disparité certaine dans la production des diverses espèces, induite en général par les conditions climatiques qui règnent au moment de la floraison printanière. Il se produit aussi souvent une alternance dans la fructification, les arbres ayant beaucoup produit telle année seront en général peu chargés l’année suivante.
Avez-vous déjà fait attention en entrant dans le village depuis St Martin ? Si oui, vous aurez remarqué une dizaine de poiriers se succédant au bord de la route, plantés là voici quelques dizaines d’années par ce que l’on nommait alors les « Ponts et chaussées ». Comme presque tous les ans, ils croulent littéralement sous les fruits (photos 1 à 4) qui, comme tous les ans aussi, vont piteusement s’écraser sur la route ! Il fut un temps où la poire était un fruit apprécié et qui se conservait relativement longtemps pour certaines variétés d’hiver. On la consommait fraîche, ma grand-mère en faisait des bocaux de conserves avec un bâton de cannelle et une gousse de vanille, elle était également séchée en quartiers (« Beeraschnetz ») pour la confection d’un roboratif gâteau de Noël (« Beerawecka »). Pour la distiller, il fallait qu’elle soit parfaitement mûre pour livrer son sucre et exhaler ses arômes. On déposait soigneusement la récolte sur de la paille au grenier et on surveillait le mûrissement de chaque fruit. Il fallait que celui-ci soit quasiment blet pour qu’on le prélève et l’expédie au tonneau.
Autre fruit un peu tombé en désuétude, le coing (qui pousse sur le cognassier), dont il ne reste guère que quelques individus souvent négligés au fond d’un jardin. Ces gros fruits jaunes, piriformes et souvent recouverts d’un duvet blanchâtre, possèdent une pulpe coriace, indigeste à l’état cru. En mûrissant, ils s’entourent néanmoins d’un parfum très prégnant et puissant. On en fait (faisait…) des confitures (gelée ou avec des morceaux, c’est bien meilleur… avis perso…), des pâtes de fruits, ou de l’eau-de-vie. Pour ce dernier usage, il fallait toutefois hacher et triturer les fruits avant la mise au tonneau pour permettre la fermentation. Parfois, lors des distillations hivernales et nocturnes, on posait une tranche de coing frais sous l’écoulement du schnaps, ce qui conférait à ce dernier une agréable et suave fragrance.
Dans ces mêmes vergers, la mirabelle est passée très vite cette année, ce fut une petite récolte, insuffisante pour satisfaire à tous ses usages potentiels : frais, tartes, confitures, conserves, distillation. On aura eu du mal à trouver quelques jolis fruits aux joues rougies par le soleil (photo 7), il est vrai plutôt rare cet été ! Sa cousine la quetsche termine actuellement son cycle. Là aussi, la récolte n’aura pas été pléthorique. Les jolis fruits allongés et couverts de pruine (photos 8-9) ont rapidement été sujets au dessèchement, puis à la pourriture lorsque la pluie s’est invitée. Peu de tartes aux quetsches (saupoudrées de cannelle bien sûr), encore moins de quetsches séchées au four, un usage aujourd’hui disparu et qui permettait de conserver ces fruits agréablement acidulés pendant l’hiver. Cachés dans une boite en fer blanc, ils constituaient une jolie douceur à suçoter ou, réhydratés dans l’eau-de-vie, entraient tout comme la poire dans la composition du gâteau de Noël.
Les noix, par contre, seront cette fois-ci d’une rare abondance. Avec quelque avance sur le calendrier, leur brou s’est déjà fendillé ou carrément ouvert (photos 10-11-12) pour les laisser tomber au sol. Après séchage, il y aura du travail pour les décortiquer et les conserver pour les intégrer dans les Bredele de Noël. On se souviendra que ces fruits ont très longtemps fourni l’essentiel de l’huile utilisée en cuisine.
Mais la reine du verger en cet automne débutant est indiscutablement la pomme. 2011 est une année à pommes comme rarement, avec une abondance généralisée. Cet arbre est évidemment très présent à Breitenbach ; autour des maisons comme dans les prés-vergers qui ceinturent le village. Certaines sont déjà bonnes à croquer, d’autres variétés (Reine des reinettes, Booskop, Chreschtkendel) attendront encore quelques semaines avant d’être cueillies et soigneusement stockées pour bien se conserver jusqu’au printemps prochain. Je ne vous ferai pas l’injure de détailler tous ses usages… saluons toutefois la récente valorisation du fruit en jus de pomme dans l’atelier JUVAL qui permet qu’une partie de la production ne finisse pas en pourrissant sous les arbres.
Pour le simple plaisir des yeux, et pour vous faire saliver, je vous en offre un gros panier (photos 13 à 25).