26 Sep André KOENIG
De passage à Breitenbach pour fêter les 50 ans de la SARAP, André Koenig, son principal concepteur, a quitté le milieu de l’automobile depuis quelques décennies pour d’autres sphères. Un parcours périlleux, semé d’embûches, mais au final, une « belle aventure. »
Passionné d’aviation depuis l’enfance, (« jusque dans mes rêves nocturnes » dit-il), ce pur autoditacte deviendra, après des années de travail personnel acharné, chargé de projet dans le domaine aéronautique. Il vit actuellement du côté d’Albi où il continue d’apporter une aide précieuse à l’aéro-club local.
Un bref passage au Centre d’Apprentissage à Obernai dans sa jeunesse lui permet de toucher à plusieurs métiers: ajusteur, serrurier, menuisier… . Son investissement dans la construction des SARAP, puis des BUGGYS, le montage des dossiers techniques constituent pour lui une précieuse expérience. Parallèlement, il continue d’assouvir sa passion première. « J’étais toujours plongé dans la littérature aéronautique, je ne maîtrisais pas le sujet. » Finalité de cette boulimie? Construire un engin capable de voler! En 1968, il effectue un stage à Issoire chez un constructeur d’avions utilisant du composite . « Je suis revenu avec un carnet de notes bien rempli. »
Le challenge est lancé: fabriquer « un avion solide, mais léger. » A côté de son activité principale, évidemment! Car il a créé sa propre société, « Koenig Engineering », spécialisée dans le composite industriel, qui produit des pièces en fibre de verre comme les comptoirs de banque, les baignoires de massage… Pour concrétiser son projet, André se replonge dans les bouquins. C’est qu’il faut en maîtriser des connaissances: résistance des matériaux (RDM pour les initiés), études des structures, calcul de charges, aérodynamique… De plus, un coefficient de sécurité est requis pour chaque type de pièce.
Mais en 1975, la malchance s’en mêle: l’atelier s’envole… en fumée, tout est anéanti! Dire que le self-made man avait déjà développé un monoplace en fibre de verre! Nullement découragé, il s’obstine. Son premier avion, le TOM POUCE, volera en 1979. Un moteur de Volkswagen à l’arrière, 2 poutres qui tenaient un empennage en V inversé. Le jour où les DNA sont venues pour un reportage, l’engin tombe dans un champ de maïs! « Quand on voit l’avion disparaître, on prend conscience de sa responsabilité. » Le TOM POUCE ne volera plus, même s’ « il n’y a pas eu trop de casse. »
André rencontre un industriel qui lui demande de fabriquer des pièces en fibre de carbone, des pièces très complexes pour l’industrie nucléaire et des pièces prototypes destinées à être cassées. « Ce n’est qu’en cassant qu’on trouve les limites » explique-t-il. Il élabore ainsi le prototype du ventilateur du Char Leclerc.
Toujours hanté par la mise au point d’un engin volant, il s’oriente vers la construction d’ULM. Nouveau coup du sort! Suite à une erreur de pilotage, son prototype s’abîme à Albé. Les malheurs s’enchaînent. L’engin qui devait être construit en série est en avance sur une règlementation tardant à être officialisée. C’est le dépôt de bilan de la société. « J’avais travaillé pour du beurre. »
Robin, le principal constructeur d’avions légers en France lui ouvre grand ses portes à Dijon. Appelé à développer un modèle en série, il a désormais un titre d’ingénieur dans un bureau d’études. Maître de stage, il assiste aux thèses. « J’ai toujours apporté un côté pratique aux jeunes » ose-t-il. Les attentats du 11 septembre affolent l’avionneur. La recherche est bloquée, « on se concentre sur ce qui existe. » En 2003, André est en pré-retraite et s’installe dans le Sud.
Il se consacre à nouveau à la fabrication de pièces « très spéciales » sans pour autant renier son hobby. Avec un ami, il reconstruit un ULM qui vole encore à ce jour.
A Albi, il est consulté « pour des moutons à 5 pattes ». « J’aime bien » avoue-t-il avant de conclure, pragmatique cette fois: « Ce fut une belle aventure, mais je ne me suis jamais enrichi. Ce qu’un élève-ingénieur acquiert en 2-3 ans, j’ai mis 20 ans à l’acquérir. »
L’AVENTURE BUGGY-BUFFALO-SARAP
Avant de se lancer dans la mise au point d’aéronefs, André Koenig avait expérimenté ses connaissances en mécanique et carrosserie avec l’élaboration de plusieurs modèles de voitures dont sont dérivées les Buggys qui circulent encore de nos jours.
Vers la fin des années 60, dans l’appentis qui jouxte sa maison, André et une bande de copains, dont Francis, son cousin, s’activent sur un rêve un peu fou: mettre au point une voiture destinée à la compétition, livrée en kit.Des pilotes automobiles font le déplacement à Breitenbach et sont séduits.
Quittant ce local exigu, l’équipe s’installe dans une vieille usine textile à Colroy où naît la SARAP (Société Alsacienne de Recherches et d’Applications des Plastiques) qui donnera son nom à la voiture. Les améliorations sont constantes. Pour financer leur projet, les néo-constructeurs fabriquent en sous-traitance des éléments en fibre de verre.
Quelques épisodes plus tard, quelques échecs et désillusions aussi puis la collaboration de Roland Beilé, pilote et publiciste, la fabrication du bolide est abandonnée au profit d’un modèle qui a le vent en poupe, le BUGGY BUFFALO, présentée officiellement le 11 mars 1970.
« Un engin qui a tout réussi du premier coup » se réjouit encore aujourd’hui André. Là aussi, on ne se repose pas sur ses lauriers et on perfectionne.
Les commandes affluent. Comme le châssis est tubulaire, pas d’autre solution pour les satisfaire que d’utiliser les tuyaux de chauffage de l’usine!
Un industriel entre dans le capital, la structure de la société change. Les compères replient bagages pour s’installer à Sundhouse cette-fois. André Koenig décide de voler de ses propres ailes…
Côté BUGGY, les véhicules deviennent de plus en plus performants. 300 exemplaires sont vendus entre 1972 et 1974, année du choc pétrolier. Le sport automobile est banni en France. les stocks sont bradés. Les BUGGY BUFFALO ont vécu!
Lorsque la situation se stabilise, le BUGGY SARAP prend le relais du BUFFALO. Quelques changements en carrosserie et ça redémarre! 199 d’entre eux trouveront preneur. Mais les difficultés financières resurgissent. La fabrication s’arrête définitivement en 1977.